19/04/2013
MARIAGE POUR TOUS : UNE DROITE DÉBOUSSOLÉE
« Ce que vous faites ici est une brèche qui ne se refermera pas si ce texte passe, c'est absolument scandaleux (...), eh bien, moi, je vous accuse, mesdames et messieurs de la gauche (....), vous êtes en train d'assassiner des enfants ! » Ça, c'est ce qu'on a entendu de plus outrancier dans la bouche d'un élu de l’opposition, celle du député UMP du Rhône Philippe Cochet (à ne pas confondre avec Yves Cochet, député européen EELV). [1] En sus des propos délétères, les députés ont même failli en venir aux mains lors des débats sur le mariage pour tous. [2] Une pathétique tragicomédie politicienne qui n’honore pas l’Assemblée. Force est de constater que nombre de députés de l’UMP durcissent leur discours à ce sujet tant par conservatisme, voire étroitesse de vue, que sous la pression du Front national, principal bénéficiaire de la radicalisation d'une frange de l’opinion. [3] Une actualité qui fait curieusement écho aux propos de feu Jacques-Antoine Gau, député socialiste de l’Isère, stigmatisant en 1974 « la formidable campagne d’intimidation qui n’a cessé de se développer et de s’amplifier depuis la dernière discussion parlementaire, arriverait à réduire les partisans d’une solution libérale ! Les auteurs de cette campagne disposent de moyens sur l’origine desquels il est permis de s’interroger. […] Quelle mobilisation pour exercer sur l’opinion et sur les parlementaires ce qu’il faut bien appeler un véritable terrorisme intellectuel et moral ! De telles pressions sont intolérables et la dignité du Parlement exige qu’elles soient condamnées du haut de cette tribune. » [4] Cette violence au sein de l’hémicycle de la Représentation nationale rappelle, en effet, celle qui a présidé les débats sur l’avortement en novembre 1974. Aujourd’hui comme hier, ce sujet « suscite passions et réactions, déchaîne les controverses, pose de naturelles interrogations et il continuera sans doute à en poser. Il n’a jamais été franchement abordé, et donc jamais résolu » pour reprendre les propos d’Henry Berger, député gaulliste de la Côte-d’Or rapporteur des différents rapports relatifs à l’IVG, lors de la discussion du projet de loi sur l’interruption volontaire de la grossesse (IVG) le 26 novembre 1974 qui soulignait déjà que « Toutes les compétences ont été sollicitées : médicales, juridiques, démographiques ou religieuses ». Un autre gaulliste, Albin Chalandon, soulignait à l’époque que « Prendre position dans ce débat au nom de l’Etat, c’est d’abord procéder à une ascèse : c’est oublier sa religion, sa métaphysique, sa morale même. L’Etat est neutre. Il est laïque. Il est dans le siècle. Son rôle est d’apporter une solution aux problèmes concrets tels qu’ils se posent dans la société et non pas tels qu’on voudrait qu’ils se posent. Et c’est un clérical catholique qui vous parle ! » [5] Des paroles que ne renierait pas aujourd’hui le rapporteur du projet de loi sur le mariage pour tous, Erwann Binet ; le député socialiste de l’Isère est catholique, père de cinq enfants, ancien scout et servant d’autel. [6]
En 1974, le débat sur l’IVG au palais Bourbon a duré quatre jours. [7] Le sujet suscite un tel intérêt qu’il est retransmis à la télévision. Simone Veil, ministre de la Santé, subit des attaques violentes et même des insultes multiples et répétées de nombreux députés au sein même de la majorité à laquelle elle appartient ! Les propos vont s’envenimer et souvent dépasser les limites du raisonnable. Ainsi, le 26 novembre 1974, le député René Feït, hostile à la loi sur l’IVG, fait entendre à la tribune de l'Assemblée un enregistrement des battements de cœur d'un fœtus avant de comparer l’avortement au génocide des juifs… [8] Aujourd’hui, la mode est plutôt aux ballerines esseulées. [9] Toutefois, que lit-on aujourd’hui sous la plume de Daniel Muraz du Courrier picard :
La radicalisation des mouvements de contestation est un air connu. Mais celle-ci devient, ici, nauséeuse, quand se mêlent les prières de rue de Civitas, les saluts hitlériens esquissés dans les derniers rassemblements, les appels sanguinaires d'une Frigide de plus en plus Barjot ou la prédiction d'une « guerre civile » par Christine Boutin. Et cela devient franchement inquiétant quand se libère une parole ouvertement homophobe et qu'apparaissent des agressions physiques.
La décision gouvernementale d'avancer le calendrier parlementaire a été ressentie - non sans raison - par les opposants comme un acte de mépris de plus. Si cette finesse tactique s'avère devenir la faute politique, la bienveillance ambiguë de l'UMP à l'égard des mouvements extrémistes qui fleurissent au cours de ce printemps français l'est encore plus. En participant à légitimer une mouvance à la logique de plus en plus factieuse. Le rose de la Manif pour tous vire singulièrement au noir. [10]
« Oui, mais voilà : le peuple gronde contre le régime, et donc contre Hollande et les socialistes, et c'est difficile, quand on est un leader de l'opposition, de résister à la tentation d'en faire trop », conclue Anna Cabana pour expliquer cette inquiétante dérive séditieuse, d’autant qu’il y aurait « Panique à l’Élysée » d’après la presse réactionnaire [11] qui dénonce « Ces Français qu’on bâillonne » ; Arnaud Folch précise aimablement que « Même si le FN est, aussi, un réceptacle des mécontentements de gauche, ses électeurs restent, quoi qu’on en dise, très majoritairement de droite ». [12]
Selon l’inénarrable Eric Zemmour, « Les Français rejettent Mai 68 » [13] mais les opposants au mariage homosexuel rêvent, aux dires d'Eric Branca, d’un « 1968 à l'envers », divaguant à haute voix d’un pouvoir aux abois. [14] N'est-ce pas là la contradiction d'une droite déboussolée (cf. l'introduction de François d'Orcival à ce propos). Il est vrai que les masques sont tombés : des fanatiques nous promettent du sang et des larmes. [15] D’ailleurs, le cardinal André Vingt-Trois conforte cette vision apocalyptique : selon l’archevêque de Paris, il « "se prépare une société de violence". Pour lui, il existe désormais une "fracture" entre le pouvoir civil et les chrétiens ». [16] Une représentation surannée tant elle évoque les luttes passées – et souvent perdues – entre la République et l’Eglise, notamment en matière de laïcité. Une déclaration affligeante également pour une majorité de catholiques confrontés à une hiérarchie ecclésiastique dogmatique et obtuse à ce sujet. [17] Une attitude très éloignée en vérité de la compassion du Christ envers les pauvres, les opprimés, les faibles, les parias et les étrangers, une caractéristique pourtant importante du ministère de Jésus. Une position, enfin, qui attriste François Vercelletto du quotidien Ouest-France, lequel constate que « le mariage pour tous commence à prendre un tour quasiment obsessionnel qui ne manque pas de m'interroger sur l'appréhension des véritables priorités pour un chrétien d'aujourd'hui », déplorant l’absence de « parole fraternelle envers les personnes homosexuelles » tout en dénonçant l’ostracisme dont sont victimes les « catholiques pratiquants qui sont favorables au mariage homosexuel ». [18] « Sommes-nous devenus fous ? », s’interroge de son côté Bruno Frappart dans les colonnes de La Croix : « Entendre parler de menace de "guerre civile", en ce moment, en France, à propos du mariage gay, voilà qui traduit bien le dérèglement des esprits. […] Car quand les mots dérapent, il existe toujours le risque que les choses les suivent et que la violence, de verbale, devienne concrète, palpable. Certains, d’ailleurs, ne s’y trompent pas, qui adoptent des méthodes musclées, physiques, où l’intimidation est la seule ligne politique. On ne compte plus les incidents, les interruptions de conférences, de débats provoqués par des groupuscules fascisants. » [19] Un constat que partage Hervé Favre de La Voix du Nord : « La violence verbale des opposants au mariage pour tous ne peut qu’encourager les agressions homophobes comme celle commise à Lille ». [20] Ces groupuscules d’extrême droite qui « cassent du pédé » oublient visiblement les précédents d’Ernst Röhm ou, plus près de nous, de Jörg Haider. [21] Toutefois, ce fantasme d’un « contre-Mai 68 » n’est pas l’apanage des extrémistes, même les modérés y songent comme le démontre Anna Cabana :
Mais même sans aller jusque-là, il y a ce parallèle violent dressé par Jean-Pierre Raffarin entre le climat actuel et Mai 68. L'ancien Premier ministre a déclaré avant-hier sur RTL : « On voit bien, pour parler à la de Gaulle, qu'il y a une menace de chienlit dans le pays. » Parler de « chienlit », en effet, ça sonne clairement comme une menace... [22]
Un climat de haine que des députés UMP attisent en invoquant un déni de démocratie, « un classique de l’histoire politique française » selon Jean-Yves Camus :
Quand la gauche détient le pouvoir, la droite ne remet pas en cause uniquement son projet politique mais sa légitimité démocratique même. Parler de « coup d’État » alors que le gouvernement ne fait qu’accélérer une procédure, c’est un vocabulaire totalement déconnecté de la réalité. Qu’on soit d’accord avec lui ou pas, le gouvernement reste dans le cadre démocratique. À moins qu’il ne faille considérer tous les exécutifs qui ont utilisé précédemment la procédure d’urgence comme illégitimes… [23]
« Le gouvernement fait un coup de force. Il n’a rien compris ? C'est la guerre civile qu'il veut ? », écrit avec provocation le député UMP de la Manche, Philippe Gosselin, sur Twitter le 12 avril 2013 (6 h 37) tandis que Guillaume Peltier, vice-président du mouvement et chef de file de « la droite forte », s’engage à abroger la loi sur le mariage pour tous si la droite revient au pouvoir en 2017. [24] Bien évidemment, comme disait Henri Queuille, les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent… C’est d’ailleurs ce qu’observe Matthieu Deprieck de L’Express : « Le mariage gay devrait être adopté par le parlement ce mardi. Et plus l'issue de ce long débat approche, moins les élus UMP à promettre un retour en arrière en 2017 sont nombreux. » [25] Aussi notons-nous en conclusion cette remarque de Michel Urvoy sur son blog Politiquement chaud, le 15 avril dernier : sans les voix de la droite, le projet de loi ne passait pas au Sénat ! [26] Finalement, qui bâillonne qui ? Qui manipule qui ? Qui piège qui ? [27]
[1] Anna Cabana, « UMP, mariage gay, et "chienlit" : le risque d’en faire trop ! » in Le Point, 19 avril 2013.
http://www.lepoint.fr/politique/la-politique-par-anna-cab...
[2] « Mariage gay : bagarre dans l’hémicycle » in Le Point avec AFP, 19 avril 2013.
http://www.lepoint.fr/politique/mariage-gay-les-deputes-e...
[3] Isabelle Ficek, « La radicalisation de l’opinion profite au Front national » in Les Echos, 19 avril 2013.
http://www.lesechos.fr/economie-politique/politique/actu/...
[4] Compte rendu des débats de la séance du 26 novembre 1974, 1re séance, page 7005.
http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/interruption/1974-11-26-1.pdf
[5] Compte rendu des débats de la séance du 26 novembre 1974, 2e séance, page 7027.
http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/interruption/1974-11-26-2.pdf
[6] Olivia Elkaim, « Erwann Binet, défenseur du mariage gay et catholique » in La Vie, 11 janvier 2013.
[7] Loi du 17 janvier 1975 relative à l’interruption volontaire de grossesse
http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/interruption/sommaire.asp
[8] Compte rendu des débats de la séance du 26 novembre 1974, 2e séance, page 7029.
http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/interruption/1974-11-26-2.pdf
[9] Hélène Bekmezian, « Mariage pour tous : une ballerine met le feu à l’Assemblée » in Le Monde, 19 avril 2013.
http://www.lemonde.fr/societe/article/2013/04/19/nouvelle...
[10] Daniel Muraz, « Le fond de l’air effraie » in Le Courrier picard, 19 avril 2013.
http://www.courrier-picard.fr/france-monde/le-fond-de-l-a...
[11] François d’Orcival, « Panique à l’Elysée » in Valeurs actuelles, 18 avril 2013.
http://www.valeursactuelles.com/panique-l%E2%80%99%C3%A9lys%C3%A9e20130417.html
[12] Arnaud Folch, « Ces Français qu’on bâillonne » in Valeurs actuelles, 18 avril 2013.
http://www.valeursactuelles.com/fran%C3%A7ais-qu%E2%80%99...
[13] Geoffroy Lejeune, « Eric Zemmour : "Les Français rejettent Mai 68 et veulent restaurer leur pays d’avant" » in Valeurs actuelles, 18 avril 2013.
http://www.valeursactuelles.com/%E2%80%9C-fran%C3%A7ais-r...
[14] Eric Branca, « 1968 à l’envers » in Valeurs actuelles, 18 avril 2013.
http://www.valeursactuelles.com/1968-l%E2%80%99envers2013...
Stéphanie Le Bars, « Mariage homosexuel : les opposants rêvent d’un "contre-Mai 68" » in Le Monde, 4 avril 2013.
Alain Auffray, « L’UMP joue la carte du raz-de-marée populaire » in Libération, 17 avril 2013.
http://www.liberation.fr/politiques/2013/04/17/l-ump-joue-la-carte-du-raz-de-maree-populaire_897029
[15] Julie Reynié, « Des anti-mariage pour tous prédisent "une guerre civile" » in RTL, 12 avril 2013.
http://www.rtl.fr/actualites/info/article/des-anti-mariag...
Dom Bochel Guégan, « Barjot promet le sang, Boutin la guerre civile : les masques sont tombés » in Le Plus, 13 avril 2013.
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/818847-barjot-pr...
[16] Marie-Lucile Kubacki, « André Vingt-Trois : "Il se prépare une société de violence" » in La Vie, 16 avril 2013.
[17] « Mariage homosexuel : Mgr Pontier "sur la même position" que le cardinal Vingt-Trois » in Urbi&Orbi, 19 avril 2013.
http://www.la-croix.com/Urbi-et-Orbi/Actualite/France/Mar...
[18] François Vercelletto, « Mgr Vingt-Trois me fait de la peine » in Etats d’âme, 16 avril 2013.
http://religions.blogs.ouest-france.fr/archive/2013/04/16/mgr-vingt-trois-me-fait-de-la-peine.html
Aymeric Christensen, « Ces chrétiens qui défendent le mariage gay » in La Vie, 14 décembre 2012.
[19] Bruno Frappart, « Sommes-nous devenus fous ? » in La Croix, 19 avril 2013.
http://www.la-croix.com/Actualite/France/Sommes-nous-deve...
[20] Hervé Favre, « Violence verbale, violence physique » in La Voix du Nord, vendredi 19 avril 2013.
[21] Abel Mestre et Caroline Monnot, « Mariage gay : ces groupuscules d’extrême droite aux méthodes violentes » in Le Monde, 19 avril 2013.
http://www.lemonde.fr/politique/article/2013/04/19/mariag...
P. S. et B. DU., « Agression homophobe dans un bar gay du Vieux Lille : le patron évoque une montée de tension due au mariage pour tous » in La Voix du Nord, 19 avril 2013.
http://www.lavoixdunord.fr/region/agression-homophobe-dan...
[22] Anna Cabana, « UMP, mariage gay, et "chienlit" : le risque d’en faire trop ! » in Le Point, 19 avril 2013.
http://www.lepoint.fr/politique/la-politique-par-anna-cab...
[23] Laurent Mouloud, « Mariage pour tous. "On assiste au retour des réseaux catholiques traditionnalistes" selon Jean-Yves Camus » in L’Humanité, 15 avril 2013.
http://www.humanite.fr/societe/des-reseaux-catholiques-traditionalistes-520250
[24] Jean-Baptiste Garat, « Peltier : "Nous abrogerons le mariage pour tous" » in Le Figaro, 17 avril 2013.
http://www.lefigaro.fr/politique/2013/04/17/01002-20130417ARTFIG00563-peltier-nous-abrogerons-la-loi-sur-le-mariage-pour-tous.php
[25] Matthieu Deprieck, « Mariage pour tous : la droite est en train de lâcher l’idée de revenir dessus en 2017 » in L’Express, 19 avril 2013.
http://www.lexpress.fr/actualite/politique/mariage-pour-t...
[26] Michel Urvoy, « La droite fait voter… le mariage gay ! » in Politiquement chaud, 15 avril 2013.
http://politique.blogs.ouest-france.fr/archive/2013/04/15/la-droite-fait-voter-le-mariage-gay.html
[27] Cécile Cornudet, « Mariage gay : le jeu du qui piège qui ? » in Les Echos, 18 avril 2013.
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18/11/2012
MANUEL VALLS, LE CONNÉTABLE DE FRANCE
« Valls qui accuse la droite d’être responsable du retour du terrorisme, c’est… » [1] :
□ la porte !
□ sa première grosse bourde.
□ une erreur, mais il l’a reconnue.
□ une polémiquette.
□ bien envoyé !
□ le cadet de mes soucis.
■ habile !
Cette incartade relève, en réalité, davantage du dérapage prémédité que de la bévue improvisée.
Le ministre de l’Intérieur a, en effet, besoin de redorer son blason à gauche – sans pour autant se renier – et faire oublier par la même occasion les éloges des caciques de l’UMP à son égard, afin de recentrer son image après avoir dérivé durant des années sur la droite du PS et au-delà.
Mieux, en suscitant la fureur de l’UMP, il manœuvre adroitement pour protéger le président de la République en détournant une partie du flot médiatique au moment où les feux de la presse sont braqués sur François Hollande, qui doit justifier le même jour son revirement (reniement ?) politique lors d’un grand oral télévisé, un exercice éminemment risqué pour n’importe quel politicien. Pour l’actuel locataire de l’Élysée, cette querelle est un artifice délibéré qui lui permet de conforter à peu de frais sa stature de chef de l’État. [2]
La conférence présidentielle ayant été unanimement saluée par la presse, Manuel Valls a clos la polémique en exprimant ses regrets – et non ses excuses. [3]
Fidèle féal, il protège avec célérité le président de la République. Il le préserve des menaces extérieures et intérieures… au risque de l’isoler de sa propre majorité et de le confiner dans un autisme politique ; l’enfer est souvent pavé de bonnes intentions.
Son ambition est toujours démesurée mais Manuel Valls sait que sa réussite dépend de la bonne fortune de son suzerain. Son destin est désormais lié au sien. Si l’Élysée lui est interdit, Matignon lui siérait bien ! Pas tout de suite évidemment, ni frontalement. [4] L’heure n’est pas à la précipitation, ni aux prétentions, d’autant que le ministre de l’Intérieur doit consolider sa position. S’appuyant sur son fief de l’Essonne, il doit trouver des alliés afin de museler, du moins neutraliser toute opposition à son ascension ; la « bande des quatre » est une parfaite illustration de cette farouche volonté. [5]
En dépit de sa popularité, le connétable de France est, cependant, confronté à un triple problème.
Il est toujours perçu comme le fils spirituel [6], d’autant qu’il y a une continuité avec les précédents gouvernements, depuis Nicolas Sarkozy à Claude Guéant, simplement parce les hommes mis en place par le pouvoir précédent sont toujours en place ! En effet, craignant d'être accusé d'une chasse aux sorcières, le gouvernement Ayrault n'a pas touché à l'organigramme de l'institution policière hormis quelques cas symboliques car trop compromis avec le système sarkozyste. [7] Les hommes étant les mêmes, comment changer le système, comment l'améliorer, comment lui donner une autre orientation ?
Ensuite, Alain Bauer, conseiller sécurité de Nicolas Sarkozy, a toujours l'oreille de Manuel Valls, son ami de 30 ans dont il est le parrain de l'un de ses enfants. [8]
Enfin, le ministre de l’Intérieur excelle dans la communication politique, son véritable domaine de prédilection. Force est de reconnaître qu'il a parfaitement maîtrisé la communication du candidat François Hollande. La communication, c'est sa force car c'est un véritable animal politique... comme Nicolas Sarkozy. D'ailleurs, aujourd'hui, on ne lui demande pas d'assurer mais de rassurer.
[1] « Valls qui accuse la droite d’être responsable du retour du terrorisme, c’est… » in L’Express.fr, 14 novembre 2012.
[2] Delphine Legouté, « Quand François Hollande rappelle à l’ordre Manuel Valls » in Le Lab d’Europe 1, 13 novembre 2012.
http://lelab.europe1.fr/t/quand-francois-hollande-rappelle-a-l-ordre-manuel-valls-5881
Sophie Huet, « Terrorisme : Hollande rappelle Valls à l’ordre » in Le Figaro, 13 novembre 2012.
[3] « Manuel Valls regrette ses propos sur la droite et le terrorisme » in Le Monde avec AFP, 14 novembre 2012.
[4] Grégoire Biseau et Lilian Alemagna, « Ayrault défend son poste » in Libération, 27 septembre 2012.
http://www.liberation.fr/politiques/2012/09/27/ayrault-defend-son-poste_849447
[5] Grégoire Biseau, « La "bande des quatre" : six facettes et petits calculs » in Libération, 27 septembre 2012.
Charlotte Chaffanjon, « PS – Ce qui se cache derrière "la bande des quatre" » in Le Point, 27 octobre 2012.
[6] Laurent Opsomer, « Place Beauvau : le fils spirituel » in Double Neuf, 20 mai 2012.
http://doubleneuf.nordblogs.com/archive/2012/05/20/place-...
Sebastian Roché, « La comparaison Valls Sarkozy. Quelle pertinence ? » in Sebastian Roché, 9 novembre 2012.
http://sebastianroche.blog.fr/2012/11/09/la-comparaison-v...
[7] Laurent Borredon, « Le gouvernement tente de reprendre le ministère de l’Intérieur en douceur » in Vu de l’intérieur, 8 octobre 2012.
[8] Nathalie Segaunes, « Le sarkoboy qui chuchote à l’oreille de Valls » in Le Parisien, 19 octobre 2012.
Alexandre Devecchio, « Alain Bauer : "Manuel Valls ne doit pas craindre de devenir la bête noire d’une certaine gauche" » in Atlantico.fr, 28 juin 2012.
10:46 Publié dans Perso, Politique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : manuel valls, françois hollande, terrorisme, droite, ump, assemblée nationale, polémique, bourde, bévue, ministre de l'intérieur, provocation, erreur